Mamadou
Par Roseline VACHETTA ACO Secteur de Grenoble – Equipe Fontaine
Un matin de mai je croise Mamadou dans la rue, il est arrivé à Grenoble la veille au soir. Malgré la nuit dehors, il a un grand sourire. On se parle. C’est une vraie rencontre, de celles dont on pressent qu’elles vont bouger nos vies. Pendant plusieurs semaines il dort dehors. Nous nous voyons régulièrement, j’ai mis mon copain Antoine dans le coup, et tour à tour nous l’accompagnons pour les démarches. Peu à peu, il raconte son récit: la répression dès l’école, la fuite pour ne pas être tué, 3 années d’errance, l’esclavage en Libye, la traversée de la Méditerranée sur un canot surchargé qui prend l’eau, la peur. Il vient juste d’avoir 20 ans!
Mais toujours, il a foi en lui, en nous, plus que nous parfois. Il dit souvent «on est debout ensemble», «ça va aller». Il joue à fond la solidarité avec les autres jeunes guinéens. Arrive le temps du Ramadan. Il me dit qu’il va le faire. Je cherche tous les arguments possibles pour l’en dissuader, c’est vrai comment va-t-il tenir le coup ici? Antoine, athée convaincu, me dit que faire le carême ça peut l’aider et que c’est à lui de décider. Mamadou maintient sa décision. Du coup, on parle foi! Il me dit que je suis une vraie croyante parce que Mahomet a dit que la foi c’est d’aimer les autres et de les aider. Je lui parle de l’amour de Dieu. Il dit que c’est le même Dieu, le sien et le mien, puisqu’il nous dit d’aimer les autres qui sont là. Souvent il dit «il faut faire le programme». Moi «c’est quoi le programme?» Lui «c’est ce qu’on a à faire en tant qu’humains, même si ce n’est pas grand-chose et Dieu il fait le reste».
Avec cet «encore enfant» étranger, d’une autre couleur, d’un autre continent, d’une autre religion, il me semble que je redécouvre émerveillée la joie et la force de Noël, le miracle de ce bébé sans domicile, sans papiers, migrant lui-aussi, mais qui nous apporte tout l’Amour de Dieu !