Feuilles d’automne de Pierre Miot

L’automne est déjà là … !
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L’automne qui arrive et la vieillesse qui est déjà là nous installent tout naturellement dans
le cycle normal de la vie et des saisons. Avec leurs couleurs changeantes qui varient selon leur
exposition au soleil, la saison d’automne et l’automne de la vie font ressortir des teintes et des
nuances tout à fait extraordinaires qui donnent un relief très particulier, non seulement à nos
paysages naturels familiers, mais également à nos paysages intérieurs plus intimes.


La vie des saisons et les saisons de la vie
Si les saisons de la vie sont à l’image des quatre saisons de l’année, il y a bien un printemps avec le réveil de la vie et les promesses de renouveau, avec les impatiences du premier âge, avec les ardeurs et les enthousiasmes de la jeunesse. Il y a bien un été avec les fruits de la terre qui mûrissent sous le soleil et les choix décisifs de l’âge mûr qui orientent toute une vie.


Il y a aussi l’automne avec la rentrée des récoltes et les feuilles qui tombent, avec les forces qui
diminuent et le recueil des fruits d’une période féconde qui est toujours à revisiter. Et il y a, parfois douloureux, des hivers plus rigoureux, avec la terre qui s’endort avant d’autres germinations, avec le grand âge et les pertes d’autonomie et la traversée de la nuit dans l’attente d’un nouveau soleil.
Ainsi va la vie, d’âge en âge, au sein d’une galaxie … !


Poussière éphémère
Selon Hubert REEVES (1), nous ne sommes que « des poussières d’étoiles, quelque part dans
l’immensité de l’univers » et selon Edgar MORIN (2), seulement « un moment éphémère de
l’extraordinaire évolution de l’aventure humaine ».

Ces deux grands scientifiques nous situent, individuellement et collectivement, avec beaucoup
d’humilité, à la place qui est la nôtre, très modeste, dans l’espace et dans le temps. Fragiles et
vulnérables, nous sommes aussi capables de solidarité et de fraternité et responsables face à
l’impérieuse obligation de devoir prendre soin du devenir de la planète-Terre et de l’humain de
l’humanité toute entière. La pandémie, la guerre, le dérèglement climatique, les pauvretés, les
migrations nous en rappellent, davantage encore aujourd’hui, l’extrême urgence.


Il y a un temps pour tout
Avec l’âge qui avance et les années qui s’additionnent au fil du temps, il faut savoir, à un moment donné, mettre fin à certaines activités et en réduire d’autres, sans perdre de vue le cap qui a été considéré jusqu’à maintenant comme essentiel et qui a déterminé les engagements et les choix des années écoulées.

Les emplois du temps qui s’en trouvent modifiés et allégés offrent alors la possibilité d’ouvrir
d’autres espaces pour plus de silence et de réflexion, pour entrer un peu plus en soi-même et pour prendre un peu mieux conscience de ce qui a été vécu jusqu’ alors.

A la recherche de la Source
En ce qui me concerne, et ce n’est pas le plus facile, j’aimerais pouvoir le formuler, même
maladroitement, et trouver des mots justes pour essayer de dire ce qui m’inspire en profondeur et me fait vivre vraiment, non par souci de littérature ou d’introspection, mais tout simplement pour être plus au clair avec moi-même et ne pas en rester aux idées convenues.

Aujourd’hui, le temps serait venu d’ apprendre une manière d’être et d’exister et non seulement de faire et de s’agiter, une manière de se recentrer et non de s’éparpiller, une manière de cultiver plus d’intériorité et d’être plus attentif au souffle de la vie au plus profond de soi et autour de soi et ainsi continuer à avancer, le reste des jours, dans la paix et la sérénité.

« Moi, dit le Petit Prince de Saint-Exupéry, si j’avais cinquante-trois minutes à dépenser, je
marcherais tout doucement vers une fontaine ». Pour l’équipe de randonneurs en montagne, la
fontaine est toujours un lieu apprécié pour un léger temps de pause, le temps de se rafraîchir et de remplir la gourde avant de repartir. Pourtant, la fontaine ne dit pas toujours où est la source qui l’alimente. Il faudra donc chercher plus haut, en amont, pour la découvrir, discrète ou jaillissante, continuant de couler, paisiblement, désaltérante et rafraîchissante.


Le chemin qui mène à la Source
En marchant sur le chemin qui mène à la Source, il est possible d’avancer en compagnie de cet
homme de Galilée dont on connaît les ascendants et le milieu d’origine et dont on sait les
convictions et les priorités. Il se définit lui-même comme le chemin et la vie et s’en remet toujours à plus grand que lui, au-delà de lui-même, à celui qu’il appelle familièrement son Père, « celui qui l’a envoyé pour transmettre au monde ce qu’il a entendu de lui ». (Jean 8 / 26)

Ses premiers compagnons « n’ont pas compris qu’il leur parlait du Père », la source qui l’inspire en permanence. Leurs récits, pourtant, retiennent de lui une manière de se comporter avec les plus faibles, les plus méprisés, les plus souffrants. Ils retiennent son style de vie en général et la qualité de son humanité, en particulier. Ils pressentent que sa détermination et sa bienveillance lui viennent d’ailleurs et que c’est un Dieu très humain qui habite en lui et agit par lui.


L’automne, celui de la vie, quand il se prolonge avec une belle arrière-saison, est un temps
merveilleux pour avancer, « tout doucement », en direction de la Source, pour s’arrêter un peu et reprendre souffle, pour écouter le murmure d’une parole qui fait vivre. Il est aussi « le temps
favorable » pour se débarrasser des définitions « toxiques » héritées d’une autre époque. Elles
« polluent » l’accès à la Source et défigurent le visage de celui qui en indique le chemin. (3)

Cet automne est également le bon temps pour ne pas oublier et rester en lien, même si les occasions de rencontres sont plus rares, avec celles et ceux qui, avec leurs organisations ou leurs Mouvements, ont été, à un moment, des compagnons de route au quotidien et qui sont des repères fiables et des appuis solides pour ceux qui, aujourd’hui encore, se bougent et se battent pour une Terre habitable et une Humanité juste et fraternelle.


« Aux jours de la vieillesse et des cheveux blancs, tu es ma force
et tu vas, à nouveau, me faire vivre. »
Psaume 71
Pierre Miot – La Roche-sur-Foron – Haute-Savoie – Septembre 2022
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1. « Poussières d’étoiles » – Hubert REEVES – Seuil – 1984
2. « Leçons d’un siècle de vie » – Edgar MORIN – Denoël – 2021
3. « La Source que je cherche » -Lytta BASSET – Albin Michel – 2017

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