Les migrants parmi nous

« Les migrants parmi nous »

 10 février 2018

 ACO secteur de Grenoble

              Le 10 février 2018, nous étions 44 présents à cette matinée d’écoute et de partage sur ce temps consacré aux « migrants parmi nous ». Sur les 44 présents , 25 étaient des membres de l’ACO et 19 des invités qui ont répondu favorablement à notre proposition de partage  , ce dont nous les remercions .

Merci encore à tous pour cette matinée riche de partages , d’échanges d’expériences , de questionnements .

Ce compte rendu est un peu long , mais nous n’avons pas voulu faire un tri dans tout ce qui a été exprimé , chaques paroles étaient importantes et un reflet de tout ce qui est vécu pour être proche ,

de diverses manières , des migrants et pour cheminer avec eux  .

Nous reprenons donc ci dessous le déroulement de cette matinée .

Mot d’accueil

La présence des migrants , qu’ils soient là pour une demande d’asile ou pour d’autres raisons fait l’objet de beaucoup de commentaires dans la presse , bien souvent négatifs , mais pas toujours .

Mais nous sommes témoins d’initiatives en tous genres qui nous montrent que nous sommes nombreux à être attentifs à la situation de ces personnes , à vouloir apporter , chacun à notre mesure ,  des solutions pour que les migrants puissent espérer en un avenir meilleur , pour que leur dignité soit respectée , pour redonner du sens à ce que l’on peut lire sur le fronton de nos mairies «  liberté , égalité , fraternité »  , mots que l’on souhaiterait voir mieux mis en pratique .

 

Nous sommes nombreux en ACO à être engagé d’une manière ou d’ une autre dans diverses associations ,  collectifs , impliqués dans l’accueil des migrants . C’esr pour cela que nous avons pris l’initiative de ce partage aujourd’hui, partage que nous voulons ouvert à tous ceux,   migrants ou pas , qui déploient des trésors de solidarité pour faire grandir l’humanité .

 

Témoignage de CHIAKA

Du témoignage de Chiaka, lors du bilan fait par l’équipe de préparation, nous avons retenu que c’est la deuxième fois qu’il est invité à un partage ACO. La première fois, à Voiron, ça l’avait beaucoup marqué, il remercie pour le soutien.

Chiaka tire de son expérience de migrant qu’il ne faut jamais désespérer, et c’est ce qu’il dit à Ruska, la jeune Géorgienne toujours sans papier, à laquelle il fait une offre de solidarité, de fraternité. Lui a été arrêté 17 fois, il sait qu’il faut lutter toujours, lutter c’est vivre et ce qui nous fait vivre c’est l’amour des proches.

Mais le parcours est vraiment difficile, à la préfecture on te demande des certificats de travail alors que tu n’as pas le droit de travailler!

Aujourd’hui, il a des papiers mais il sent toujours le racisme le plus basique.

C’est les belles rencontres qui font tenir. Et aussi de faire comme l’alouette: elle va chercher des gouttes d’eau une à une pour éteindre le feu, ça veut dire que chacun doit prendre sa part du travail.

 

Témoignage de Marie Paule et Jacques

  Comment a démarré le CARM :

Depuis le mois de mai 2016, nous faisons partie du Collectif d’accueil des Réfugiés en Matheysine (Le CARM).

Tout a commencé par une exposition organisée par Puits Art en lien avec les migrants. L’objectif de Puits’art est de réhabiliter l’ancienne chapelle de mineurs en organisant des rencontres autour d’expositions avec la participation active des habitants pour créer du lien à partir de questions de société.

Des membres du Collectif d’Accueil des Réfugiés en Trièves (le CART) sont venus témoigner de leur expérience.

Le CART accueille des demandeurs d’asiles orientés par l’ADA (Accueil des Demandeurs d’Asile).Depuis 30 ans,  L’ADA les accompagne dans leur parcours administratif et juridique. Elle les oriente vers les collectifs, parce qu’ils « vivent » (ou survivent) dans la rue et  n’ont pas encore de place en Centre d’Accueil pour Demandeurs d’Asile

Accueillir un demandeur d’asile c’est lui proposer « un toit et un couvert », un transport pour répondre aux convocations à Grenoble (services d’Etat, ADA

 

Nos  illusions, dépasser nos peurs :

Dans notre grande naïveté nous avions imaginé que les causes du départ de nos amis auraient dû leur permettre d’être accueillis en France et que le collectif aurait pu accueillir de nouvelles personnes.

La réalité est toute autre : Nous constatons que la plupart sont déboutés et qu’il ne leur est pas possible d’envisager un retour au pays !

Au sein du CARM, il y a eu un moment d’angoisse à l’idée d’accompagner des « sans papiers »… Est-on prêt à payer une amende ? Aller en prison ? Ces questions nous préoccupaient…

 

Une rencontre avec la CIMADE nous a rassurés… La Cimade rencontre régulièrement la préfecture et la mairie de Grenoble ce qui signifie qu’elle est acceptée par les instances officielles.

En Isère sur la 50 aine de collectifs qui accueillent 300 à 400 personnes, parfois en situation irrégulière, aucun d’entre eux n’a été inquiété. Tous les collectifs réunis sont aussi une force qui tranquillise car « ça se passe bien »

Le maitre mot de la CIMADE : Ne jamais arrêter l’aide apportée sous prétexte administratif, la justice sociale sert à tout le monde, l’humain est notre priorité.

Aujourd’hui l’ADA est informée qu’il nous est difficile matériellement et financièrement de nous engager à accueillir de nouveaux demandeurs d’asile tant qu’on ne connait pas la décision de la Cour Nationale des Demandeurs d’Asile.

Au cas où ils seraient déboutés, pour chacun d’entre nous, il est impossible de les « remettre » à la rue ! Les membres du CARM se sont engagés à continuer à les accompagner…

 

Le « vivre ensemble », au sein du collectif nous oblige à nous ouvrir à d’autres points de vue :

Le collectif est composé de personnes de toutes origines, tendances ou croyances différentes ! Le groupe apprend à fonctionner en tenant compte de ces grandes différences, et aussi à s’ouvrir à la richesse des apports d’autres structures ou collectifs !

 

Ce qui change, ce qui bouge : témoigner permet à d’autres de changer de regard.

Nous avons témoigné dans deux lycées, accompagnés de Mohamed, Guinéen, qui a aussi témoigné.

Derrière le mot « réfugié », les élèves ont vu un humain :

Un élève a dit : « comment tu peux encore sourire avec tout ce que tu as vécu ? » « Mon sourire, c’est mon héritage de ma mère, c’est précieux, c’est tout ce qui me reste ! »

Et pour détendre l’atmosphère, il a ajouté : « maintenant, je suis à la retraite, j’ai 20ans et ne dois pas travailler

Surprenant, une personne de ma famille qui avait des propos racistes, m’a dit après avoir lu notre témoignage dans la presse : « c’est bien ce que vous faites ! » Je vois qu’on est tous capables de changer de regard quand la cause est juste !

L’an dernier, un débat après projection d’un film traitant de la migration a été programmé… Notre crainte : devoir affronter des opposants à l’immigration. Le mois dernier, une nouvelle soirée est organisée, nous nous sentions sûrs de pouvoir témoigner sans se laisser démonter !

Rencontrer les élus, pour leur expliquer la raison de notre solidarité et solliciter leur soutien.. les premières tentatives sont encourageantes ! On a un bon accueil.

Quel bonheur le sourire d’une personne accueillie et ses forces qui reviennent pour se remettre debout… Nina et Boris sont déboutés.  Il y a 1 an ½, ne parlaient ni ne comprenaient le français. Aujourd’hui, leur niveau de français leur a permis de réussir avec succès les épreuves du Diplôme d’Etudes en Langue Française. Ils sont investis dans le réseau des parents d’élèves. Grace  à ce réseau, ils ont pu trouver un logement.

Mohamed croyait que la France est un pays riche, il a vu la pauvreté au Secours populaire !

Bonheur quand nos cultures s’expriment avec nos différences et qu’un nouveau possible se fait : Mamadou croit qu’ici, les hommes ne font pas la cuisine…. Maria, à l’occasion d’une soirée festive, a préparé une spécialité kosovare, le burek.  Elle s’est senti utile, reconnue.

Bonheur quand à la question posée « pourquoi la paroisse n’est pas à l’initiative de ce soutien aux réfugiés ?» le père Armand répond « ça ouvre le champ à tous »…

Admiration de voir les musulmans pratiquer le ramadan malgré leur situation difficile. Mamadoua dit : je dois faire le programme, c.a.d  « c’est faire ce que l’homme a  à faire, même si ce n’est pas grand-chose, Dieu fait le reste ! »

Les anciens qui ont connu la guerre nous ont dit :

« Nous ne voulons plus de murs ! »Les murs ne font que renforcer la misère, la fragilité et mènent à la violence et la guerre !

Nous voulons « créer des ponts », du « vivre ensemble » et s’enrichir de nos différences.

 

Analyse des causes des migrations par Chiaka et Roseline

Les analyses proposées par Chiaka et Roseline se rencontraient bien sur les causes des migrations actuelles.

Si l’Humanité est le fruit de migrations incessantes (nous sommes tous des sang-mêlés), elles ont en ce moment la particularité d’être massives et massivement contraintes. Elles sont dues à l’impossibilité de continuer de vivre là où l’on est né pour de multiples raisons: guerres décrétées par les gouvernements des pays riches et ventes d’armes massives à n’importe quel État voire n’importe quelle faction, dictatures nombreuses dans les États du Sud et de l’Est du monde, viols et violences, pauvretés aux mille visages liées aux pillages des richesses qui alimentent aussi les multiples conflits armés, catastrophes climatiques qui touchent davantage les pays pauvres ou les populations pauvres des pays riches…C’est un système économique (capitaliste) basé sur l’appropriation du monde par quelques uns au détriment de tous les autres.

Ce système produit et encourage partout la division entre les plus pauvres, par les  stigmatisations qui peuvent être très fortes (pour les Roms notamment), les racismes contre certaines ethnies et certaines religions.

Migrer reste souvent la seule espérance de survie pour des millions de personnes. Partir est difficile mais arriver l’est parfois encore plus. C’est s’exposer à de grands dangers sur le parcours et subir, juste à l’arrivée à destination, les politiques migratoires (anti-migrants) notamment de l’UE et de certains pays qui la composent. Dont la France où la suppression de tous les droits humains qui fondent la dignité de l’Homme sont quasi disparus pour les migrants (droits au travail, au logement, à la santé, aux papiers, à la libre circulation, à l’installation)

Aujourd’hui, on ne peut pas ne pas voir, ne pas savoir. Les migrants, leur accueil ou leur rejet, sont un enjeu majeur de nos sociétés, il nous concerne tous.

Au fond nous avons le choix entre

        • nous replier sur nous à la recherche d’une identité pure et fantasmée, trier entre les bons et les mauvais migrants, choisir les uns contre tous les autres, ce que préconisent déjà des partis et des courants minoritaires de différentes religions, et c’est toute notre humanité qui va se rabougrir
        • nous ouvrir à la réalité et se la coltiner. Et c’est source d’espérance, c’est ce que donne à voir tous nos gestes de solidarité même petits (l’alouette, le colibri…). C’est dans la vie concrète et concrètement que reculent les racismes et les haines.                                                                                  Alors ce qu’on vit ensemble, qu’on soit né ici ou ailleurs, ça donne du souffle et du sens à nos vies, de la chair et de la chaleur à nos fraternités.                                       
        • Notes prises dans les carrefours 1er carrefour
        • Dans le groupe nous avons d’abord chacun décrit longuement comment nous étions attentifs concrètement aux migrants qui vivent à côté de nous.  «les maraudes la nuit c’est terrible, plusieurs fois des femmes sur le point d’accoucher, chaque nuit on rencontre une quarantaine de personnes dont une trentaine de migrants. Y a pas assez de places» «au café, avec un jeune Guinéen, aujourd’hui encore, les regards des autres consommateurs lourds de suspicion» « quand ils obtiennent des papiers, que leur situation devient légale, certains font de graves dépressions, ils prennent conscience qu’ils deviennent en quelque sorte assignés à résidence dans le pays où ils ont eu ces papiers, ils ne pourront plus jamais retourner chez eux ni s’installer ailleurs» « on a accueilli pour huit jours une personne à la rue, et ça fait deux mois qu’elle est là, tant qu’elle n’aura pas de travail et pas de logement elle pourra rester» « se réjouir des petits gestes de solidarité. J’étais au café avec un jeune quand je suis allée payer, le patron m’a dit «quelqu’un a payé pour vous»» « quand Aliou dit «qu’il fait le programme», moi aussi je le fais, ça me donne du courage» « ce qui marche, c’est de leur demander des choses plutôt que toujours donner. Les Roms à Fontaine sont très fiers de vendre leur production de pâtisserie ou de repas, pour s’acheter des vêtements neufs pour aller chercher du boulot, ils retrouvent l’estime de soi pour eux mêmes et pour leurs enfants»    Compte-rendu du carrefour animé par Michel Bérard.
        •  2ème Carrefour
        • «nous on a senti que c’était le moment de déclencher quelque chose. On est des trouillards dans le fond mais là on s’est lancé à 110 sur le plateau. Entre nous c’est sympa. On ne peut pas avancer dans la peur, il faut se brancher sur les petites choses qui marchent, pas les rater. S’unir à tout le monde et se raffermir avec des arguments. On se dit qu’il ne faut pas être branché que sur le résultat (avoir des papiers) mais bien voir qu’il se passe de belles choses sur le chemin»
        • Mais à la fois, nous vivons avec ceux et celles que nous accompagnons des merveilles et ça change nos vies:
        • «on sent que les migrants, les racismes et les solidarités ça va être un enjeu fort pour notre société».
        •  «à Repas partage, c’est pas des migrants mais c’est vraiment des cabossés de la vie»,     «le délit de solidarité, c’est vraiment révoltant»
        • A la fois nous sommes inquiets de la situation:
        • Nous sommes là parce que nous vivons de multiples expériences: dans les associations de familles d’accueillants, avec les Roms de Fontaine, au patio sur la fac,  dans les maraudes la nuit, au Adhéra, à Saint Egrève, dans d’autres associations, l’ASTI, l’APARDAP, la Cisem etc…Cela nous demande souvent de nous former aux législations actuelles, d’apprendre la patience (comme les migrants), de discuter, de manifester, de refuser une légalité injuste…jusqu’à parfois se mettre hors celle-ci.

« Je pense qu’il y a quelque chose à faire avec les immigrés. Pour mon travail j’ai beaucoup été en Afrique. Partout on était le Blanc qui avait de supers pouvoirs. Ils demandaient tous à venir en France : c’était l’Eldorado : la paix, la richesse, la justice sociale, l’accès à la santé, les Droits de l’Homme. Eux vivaient avec les assassinats, le pillage économique, la corruption…. J’ai proposé à des amis d’abord, de venir en France en visa touristique pour qu’ils se rendent compte des difficultés pour s’intégrer et avoir des papiers. Pour se rendre compte qu’il y a aussi de la misère ici »

 

  • « On peut être demandeur d’asile pour plusieurs raisons. Ce n’est pas de gaité de cœur qu’on quitte un pays, c’est parce qu’il n’offre pas ce qui est vital ! J’ai rencontré des personnes qui étaient méfiantes avec les bénévoles qui les accompagnaient, elles s’embrouillaient dans leurs histoires de vie. J’ai compris qu’on leur avait fabriqué un récit de vie pour qu’elles obtiennent l’asile politique et qu’elles devaient s’y tenir, mettant de côté leur vécu antérieur. Il faut donc respecter leur silence. À nous qui les accompagnons, ils n’ont pas besoin de tout dire. »
  • « On a l’impression que l’administration doit mettre les migrants dans des cases du coup on oublie sa propre histoire pour s’en sortir »
  • « À l’Abri St E, on accueille les migrants pour 3 ou 4 nuits. On ne pose pas trop de questions sur leur parcours. Il y a pourtant des injustices. Une Dame congolaise de 73 ans dont le mari et le fils ont été assassinés n’a pas pu obtenir le droit d’asile, elle était à la rue. »
  • « Ils n’ont pas besoin de raconter toute leur vie, nous est-ce-que nous leur racontons la nôtre ? Ils viennent ici pour vivre, pour une vie meilleure quelques fois pour aider ceux qui sont restés au village »
  • « Important d’établir une relation de confiance, avoir de la patience, accepter la frustration de ne pas revoir les personnes qui passent »
  • « Je suis fille d’immigrés italiens. En 1948 mes parents ont traversé les montagnes à pied. Je comprend ce que vivent aujourd’hui ceux qui arrivent par les Alpes. Les flics faisaient des contrôles permanents, ils rentraient dans les maisons… Il y avait de la violence envers les immigrés… C’est toujours un déchirement de partir de chez soi. C’est toujours avec une bonne raison. Ce n’est pas par gaité de cœur. Aujourd’hui les frontières ne cessent de se renforcer. On construit de plus en plus de murs dans le monde, aujourd’hui, je crois, plus de 77 ! Il faut ouvrir les frontières, ne pas avoir peur …. Il y a trop de racisme… »
  • « On a essayé de nous dire qu’il faut séparer les bons migrants des mauvais. Je suis bénévole à l’ADA et quand on quitte son pays que ce soit pour des raisons économiques ou politiques ou climatiques c’est toujours un déchirement. Les français peuvent aller presque partout et les guinéens nulle part. La violence en Lybie est inacceptable, on comprend que des jeunes aspirent à autre chose. C’est bien de soutenir le développement des pays mais cet argent à 80% ne sert pas aux projets pour lequel il est versé. Aujourd’hui il faut aussi ouvrir nos frontières pour accueillir puisque la corruption mine le développement de plusieurs pays »
  • « C’est vrai on laisse les multi nationales piller les ressources minières, il y a aussi les guerres entretenues et la vente d’armes … on tourne en rond, alors on doit partir. En France depuis plus de 10 ans je retrouve une liberté individuelle et collective …. Retrouver une dignité. »                                                                                                                     … / …
  • « Je voudrai parler de Gertrude, qui est venue au foyer SONACOTRA à côté de chez nous. Nous, on n’a pas fait d’étude et on ne pouvait pas bien l’aider, mais avec elle nous avons vécu de grands moments de fraternité. On l’a soutenue, elle nous a aussi apporté beaucoup de choses. Pourtant on ne faisait pas grand-chose, elle venait à la maison, on parlait. Je lui apportais de la soupe et les médicaments quand elle était malade. On a fait ça pendant des années. Puis elle a eu un travail, je crois qu’elle n’a pas pu avoir de papiers, puis elle a eu un logement et elle a fait sa vie … On la voit moins. Quelquefois on ne peut pas apporter grand-chose mais on était là. Pour nos enfants et petits-enfants cela a été important, ils ont vu une autre réalité…. Moi maintenant quand je sens du racisme chez les amis de mes enfants par ex j’essaye toujours de démonter les clichés … j’essaye de les faire réfléchir… »
  • « Je suis aussi fille d’immigrés, mon père n’a jamais pu parler de son passé. Plus tard ma tante a bien voulu répondre à quelques-unes de mes questions … j’ai mieux compris le silence de mon père. Les gens ont beaucoup de dignité pour ne pas raconter… L’écoute est primordiale et les mots aident beaucoup »
  • « Le cercle du silence est mon engagement. On a juste une pancarte « étrangers mais pas sans droits » Le groupe est en silence et moi je suis là pour interpeller les gens, pour discuter et répondre aux questions. Une femme m’a interpellé :  «  ils sont là et moi je suis au chômage alors … ». Je lui ai répondu que les sans-papiers n’ont pas le droit de travailler. Certains quelquefois se joignent à nous pour quelques instants »
  • « Je suis administratrice d’une association qui accueille des mineures enceintes . La majorité d’entre elles viennent d’Afrique. Elles sont sans-papiers et sont confiées à la structure par l’Aide Sociale à l’enfance. Fatou à 15 ans. Son village au Sénégal a payé un passeur pour la faire venir en France. Le parcours a été difficile. Elle est arrivée à la gare de Grenoble enceinte, perdue, sans rien connaitre de notre pays. Les éducateurs l’ont entourée. Elle a préparé la venue de son bébé sans le dire à son village. Le CA et l’équipe a réfléchi à sa situation : il est important qu’elle reste rattachée à sa famille, que celle-ci connaisse sa petite fille. Tout un travail a été fait pour qu’elle reprenne contact avec le Sénégal. Le CA a débloqué l’argent pour qu’une éducatrice parte avec elle présenter l’enfant. Ce fut très important pour Fatou , sa petite fille et sa famille. Fatou a voulu retourner en France pour continuer sa formation pour donner « un avenir à sa fille », sa situation vient d’être régularisée »
  • « Mon parcours de régularisation a été difficile. J’allais à la Préfecture, on me demandait des fiches de paie, mais on me disait aussi que je n’avais pas le droit de travailler !!!!On peut devenir fou ! Aujourd’hui même avec des papiers je vis toujours le racisme le plus primaire, c’est la chasse au faciès. Heureusement il y a des rencontres qui me font tenir. »
  • « Il y a des gens qui ne comprendront jamais, qui refuseront toujours celui qui n’a pas la même couleur. Il faut les laisser tomber et faire grandir les initiatives locales. Il faut passer à l’action, chacun à son niveau »
  • « Il est important de contrer certains propos, important d’avoir des connaissances pour le faire »
  • « La crainte des immigrés c’est devenu une recette politique, avec toutes les fausses infos qu’on véhicule pour créer la haine parce que nous n’aurions pas les richesses suffisantes pour accueillir des immigrés …peur qu’il ne nous reste plus rien !! »

 

Ce que nous retenons de ce partage :

 

  • L’accueil passe par la rencontre, l’écoute, même si c’est frustrant il est primordial de respecter les silences, les non-dits, en se rappelant que chaque réfugié à des raisons suffisamment graves pour fuir. Tout être humain devrait être libre de circuler dans le monde. Nous avons construit une politique de l’immigration inhumaine où les étrangers au pays doivent rentrer dans les cases.                                                                                                                                              … / …
  • Dès le jeune âge, il y a une éducation au respect de l’autre à faire. Être en capacité d’accepter la différence. Être en capacité de réfléchir pour démonter les propos racistes et ne pas croire n’importe quoi.
  • Tout seul c’est difficile d’agir, ensemble on est plus fort pour lutter contre l’injustice et demander un traitement humain et généreux.

3ème carrefour

 Compte rendu carrefour « Paul » –  au partage « migrants parmi nous »

 Dominique : invité par Michel

  • les inégalités me préoccupent
  • je veux continuer à faire vivre le projet de mon ex-femme Françoise Raynaud
  • c’est important pour moi d’être en contact avec les migrants
  • il n’y a pas de politique migratoire en France, il nous faut le dénoncer.
  • Actions à prévoir en direction des politiques.
  • En préparation à Fontaine, un collectif pour l’accueil tournant d’un migrant dans les familles. Michel : est venu chercher de l’information pour mieux témoigner dans son entourage de la dure réalité vécue par les migrants . Il participe ponctuellement à quelques actions quand il est sollicité. Odette : en contact avec de nombreux migrants, des femmes au relai bébé des restos du cœur. Seule chez elle, ne se sent pas d’accueillir, mais reste interpellée par cette possibilité. Jeannine : participe à l’accueil SDF du matin. Se sent interpellée. Rushka : en  France depuis plus de huit ans « sans papier ou avec papier, j’ai le droit de vivre »Anne : invitée par Elisabeth. A toujours été sensible et interpellée par « l’étranger » A participé à des groupes d’alphabétisation . Elisabeth : en contact avec des migrants à l’épicerie sociale. Arlette : a parrainé plusieurs familles ,actuellement une personne depuis huit ans . Point positif sur sa paroisse : création de l’abri st Luc où sont accueillies pour la nuit quatre femmes, dont trois sont enceintes actuellement. Serge ‘Seyssinet ‘ : se dit être un parrain républicain de terrain. Militant de l’APARDAP . Actuellement a en charge sept personnes. Ce sont des combats difficiles et couteux. A participé aux états généraux de l’immigration. Paul : accueil de plusieurs personnes. Le brassage des populations est une notion à intégrer . Le problème essentiel est le non droit au travail pour les migrants sans papiers. Il s’est dégagé du groupe qu’il était intéressant de repérer les métiers en tension (où il manque du personnel) et d’orienter les migrants vers ceux-ci, grâce au chèque emploi service universel. Il suffit d’avoir un numéro d’immatriculation à la sécu pour pouvoir en bénéficier. Beaucoup de particuliers dépendants sont en demande  car le personnel des associations est souvent absent.                                                                 
  • Témoignage PhilippeDurant ma carrière de formateur, j’ai eu à gérer un groupe de jeunes qui préparaient un CAP informatique, option connectique.Un marocain de 22 ans est très vite repéré par son intelligence hors du commun. La mettant au service de divers détournements à la carte bancaire, il se retrouve à Varces…Je suis contrit de le voir interrompre sa formation et le partage plusieurs fois avec les copains de l’équipe ACO. Une copine m’interpelle « depuis que tu nous en parles, qu’as-tu fait ? »Conséquence : je prends rendez-vous auprès du juge d’application des peines et demande l’autorisation de visite à la prison pour porter les cours à ce jeune.

    Le juge cherche à connaître ma motivation par de multiples questions intrusives auxquelles je réponds tranquillement. Pour clore ces investigations, arrive la question ultime : « qu’est-ce qui vous motive à venir faire cette démarche ? »

    Ma réponse est irréfléchie et immédiate : « ma foi en l’homme » et le juge de conclure : « vous avez le feu vert pour accéder autant que vous le souhaitez ».

    Mohamed a pu sortir de prison pour passer son C.A.P. et le réussir. Il a ainsi obtenu une remise de peine.

    Pendant plusieurs années, j’ai pu être bénévole à ROMS ACTION et y passer pas mal de temps auprès des salariées, des bénévoles et des Roms venant en formation.

    Un jour, la directrice m’interpelle : « qu’est-ce qui te motive pour faire tout ça ? » j’aurais aimé dire mes convictions spirituelles, car c’est ce qui me pousse à tenir debout et continuer… Mais refusant de faire du prosélytisme auprès de salariés, je me suis contenté de faire la même réponse qu’au juge quelques années auparavant.

    Je reste convaincu que l’engagement près des autres vaut bien une parole « de foi ».

    En début de partage nous avions projeté une vidéo «  Giorgi » : vous  trouverez ci-dessous le lien  pour la revoir : https://www.youtube.com/watch?v=Orj1fjZb-2c

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