Relais ACO du 1er avril 2023 : La réforme des retraites, parlons-en !
Centre AMAL 57 avenue Maréchal Randon – Grenoble
Présents : 27 personnes dont 5 qui ne sont pas en équipe d’ACO : Madeleine, Jean, Thomas
(les trois témoins), et Hélène Burnouf, et Colette Payen-Vigne..
Le déroulement de cette rencontre : Intro Qu’est-ce que l’ACO ?
Les mots pour le dire : réforme des retraites
Témoignages : Jean GIARD (CGT), Madeleine ROBIN BROSSE, Thomas Berthuin(CFDT)
Carrefour autour des 3 questions :
Qu’est-ce que ça nous fait dire ?
Comment cela nous touche personnellement et dans les collectifs où nous vivons (famille,
travail, organisation, syndicat, quartier…) ?
Qu’est-ce que cela nous fait affirmer comme convictions ?
Pour la restitution orale en grand groupe : paroles fortes et convictions
Le texte de l’engagement de l’ACO à propos de la Réforme des retraites (remis en salle)
Rencontre de partage avec des jeunes le samedi 22 avril à 14h au PSI 5 rue Garcia Lorca
A bientôt – chant Bella Ciao !
Introduction Régis : Qu’est-ce que l’ACO ?
L’Action Catholique Ouvrière est un mouvement d’Église sous la responsabilité de laïcs et
une association Loi 1901. Créée en 1950, ses membres vivent une double fidélité à Dieu et
au monde ouvrier. Souvent engagé.es dans les luttes pour la dignité, la justice ils essaient,
comme le Christ lui-même l’a fait, de prendre en compte les plus démunis, les plus
vulnérables et d’agir personnellement et collectivement pour que les choses changent,
comme sur la réforme des retraites actuellement.
Les membres de l’ACO dans la classe ouvrière et vivant le plus souvent dans les quartiers
populaires, tentent de témoigner aujourd’hui de Jésus Christ.
Nous sommes en lien avec la Mission Ouvrière de l’Isère, (JOC, Prêtres ouvriers et
Religieuses en monde ouvrier) nous travaillons des projets communs, notre information sur
Facebook est commune. En Isère, l’ACO rassemble près de 180 personnes réparties en 25
équipes de révision de vie, de 5 à 10 personnes.
Nous fonctionnons en petite équipe où nous pratiquons ce que nous appelons la révision de
vie c’est à dire une démarche de VOIR, JUGER, AGIR. Nous reprenons aujourd’hui la
démarche des croyants d’hier, comme sur le chemin d’Emmaüs telle que le récit en est fait
dans l’Évangile. Ils commencent par se souvenir et se raconter les évènements dramatiques
qu’ils ont vécus ; puis ils recherchent malgré leur souffrance, du sens dans cet évènement et
discernent peu à peu la présence de Dieu; enfin, ils agissent en repartant annoncer à
Jérusalem la Résurrection du Christ. En équipe d’ACO, et dans les réunions ouvertes comme
aujourd’hui, nous relisons collectivement nos vies, pour mieux repartir, et, pour les croyants
que nous sommes, essayer d’être le plus possible en cohérence avec nos convictions et
notre foi au Christ.
Aujourd’hui samedi 1er avril 2023, après la 10ème journée de mobilisation contre la réforme
des retraites l’ACO est pleinement mobilisée.
Témoignages de Madeleine ROBIN BROSSE
Je m’appelle Madeleine, j’ai presque 64 ans. Je serai à la retraite le 1er juin 2023. Je travaille
dans une association depuis 28 ans. Un travail d’accompagnement médico-social auprès de
personnes malades neuromusculaires. La fin de carrière est difficile : je chemine auprès de
personnes qui ont des maladies évolutives « au long cours ». Il y a trop de changements,
trop de logiciels à apprendre seul face à l’ordinateur, nos responsables sont devenus
managers et éloignés de la réalité du terrain.
J’ai rencontré des difficultés, « des murs » pour constituer pour ma demande de retraite. Et
de ce fait, je suis contrainte à travailler un an de plus. Je suis en arrêt maladie depuis 5 mois.
Je suis en usure de compassion. J’ai besoin de ralentir.
Qu’est-ce que ça nous fait dire ?Oui au travail-Non aux robots, utilisation raisonnée de l’IA : intelligence artificielle.
Oui au travail pour tous, correctement rémunéré pour tous : femmes, hommes, personnes en
situation de handicap, débutants, seniors.
Oui à l’accès à la retraite avant d’être usé, épuisé.
Comment cela nous touche personnellement t dans les collectifs où nous vivons ?
Je vais aux manifestations avec mon conjoint. Il exerce un CDI de chantier à EDF, sous
prolétariat moderne. Il pose ½ journée de grève et travaille l’autre ½ journée.
On retrouve des connaissances : amis, voisins, enseignants, étudiants chercheurs, retraités,
de l’aide humaine à domicile, AESH, médico-sociaux, militants, travailleur du quartier,
collègues de travail, collectif de femmes…
On chemine, on échange avec d’autres personnes rencontrées. J’ai remis à un clochard mon
ballon orange.
On s’arrête chez un boulanger solidaire qu’on a découvert dès la 1ere manifestation.
J’envoie des photos des manifestations aux copains qui n’ont pas les moyens de faire grève
ou manifestent ailleurs.
Mon gendre fait grève une heure/jour. Ma fille a été, à plusieurs reprises malade et non
remplacée. Les jours de grève, elle rattrape le retard accumulée. Sa santé ne lui permettra
pas de travailler jusqu’à l’âge de la retraite. Je manifeste pour elle par solidarité.
Qu’est-ce que cela nous fait affirmer comme convictions ?
Je ne peux pas cautionner cet esclavage des temps modernes ni les financiers qui
s’enrichissent.
Ni les élus, « droits dans leurs bottes », loin de nous.
Oui à l’intersyndicale, oui aux manifestations non-violentes.
« C’est toujours les petits qui se mouillent quand vient l’hiver et la pluie, c’est toujours les
petits qui se mouillent les gros restent bien à l’abri… ».
Intervention de Jean Giard
J’ai 96 ans …La vieillesse est à la fois une épreuve, une histoire et un projet…C’est au niveau
du projet et compte tenu de mon âge que j’ai réfléchi à « comment bien vieillir…
Pour bien vieillir, vieillir en citoyen. Exercer sa citoyenneté c’est faire de sa vieillesse une étape de l’existence
pendant laquelle chacun poursuit son épanouissement ».
Geneviève Laroque déclarait à propos de vivre sa citoyenneté jusqu’au bout de sa vie :
« Chaque individu naît citoyen et le demeure jusqu’à sa mort, quels que soient son état
physique, psychique, affectif ou social, quels que soient son âge, son sexe, quelles que soient
les différences qu’il présente dans n’importe quel domaine avec ces congénères
humains ».
Pour bien vieillir, vieillir citoyen. mais c’est quoi : vieillir citoyen ?
Vieillir citoyen, c’est d’abord vivre.
J’ai participé à la création d’une association qui a pris le nom de : vieillir c’est vivre.
Dans son manifeste fondateur, on peut lire : Vivre plus longtemps peut être une chance, à
condition de se sentir acteur de ses choix de vie et citoyen dans la société. Prendre la parole,
permettre à chacun de trouver sa place pour participer à l’évolution de la société, c’est
redonner du sens et de l’humanisme à la démocratie.
Vieillir citoyen, c’est transmettre :
Vis à vis de la jeunesse, nous avons une responsabilité particulière de transmission de
l’histoire mais aussi des valeurs pour lesquelles nous avons combattu…et qui sont
aujourd’hui trop souvent remises en cause,
Vieillir citoyen c’est participer :
C’est à ce niveau que se pose l’importance du bénévolat et du syndicalisme en tant que pilier
de la citoyenneté.
C’est pourquoi il nous faut soutenir et initier toutes les initiatives qui contribuent à changer
profondément le regard de la société sur le vieillissement, afin de donner à chacun la
possibilité de s’exprimer, d’être entendu et d’agir sur son territoire, inclure davantage la
dimension intergénérationnelle dans les préoccupations politiques, de développer et
renforcer la citoyenneté, défendre mais aussi promouvoir les droits des retraités et
personnes âgées.
Vieillir citoyen enfin, c’est résister, faire face et pas seulement faire avec :
Résister face à l’aggravation des inégalités,
Résister face aux dangers qui pèsent sur notre démocratie,Face au monde qui change, le besoin est grand de la mobilisation et de l’intervention de
toutes les intelligences et expériences.
Nous avons un monde à inventer et à préparer 2 ensembles le meilleur avenir
souhaitable pour les générations à venir.
D’où l’importance de l’engagement : Comme l’écrivait E. Mounier : « nous ne nous
engageons que dans des combats discutables sur des causes imparfaites. Refuser pour
autant l’engagement, c’est refuser la condition humaine. »
Témoignage de Thomas BERTHUIN
Thomas a 34 ans, il est délégué syndical CFDT à la CPAM. Il s’est beaucoup investi dans cette
mobilisation contre la réforme des retraites. Il insiste sur la dimension joyeuse et festive qu’il
souhaite donner aux manifestations. Avec des collègues de la Cpam, ils ont pris en charge la
mise en place d’un camion sonorisé et décoré pour animer le cortège de la CFDT, et cela 9
fois de suite. Il dit sa détermination à ne rien lâcher dans cette lutte intersyndicale, contre
un pouvoir qui ne veut rien entendre.
Retour des groupes :
Ce qui ressort de plus fort : importance de l’unité de l’intersyndicale, la non violence du
mouvement, la dimension intergénérationnelle (un groupe de jeunes de Uber eat en vélo
par exemple, des étudiants aussi ), les médias nationaux qui font beaucoup de place à la
moindre violence et ne relatent pas les cortèges partout en France, l’amitié, la joie qui se
dégagent des manifs, des dons pour les caisses de grève, pleins d’initiatives locales de
soutien, les pancartes qui montrent une vraie « poésie de la rue », une aspiration collective à
être ensemble, c’est de la vie en « plus-plus », ça va plus loin que les retraites avec un ras le
bol du libéralisme et du consumérisme, on veut un autre type de société.
Conclusion relais du 1er avril 2023
Roseline : Nous avons souhaité à l’ACO proposer ce temps de partage, au bord de ce grand
mouvement social dans lequel nous sommes plongés, acteur, actrice, ensemble chacun selon
son activité, son âge, ses propres engagements, ses propres convictions. Se poser ensemble
quelques heures avant de repartir.
Ce dont nous sommes témoins, ce à quoi nous participons c’est à la levée d’un peuple contre
l’injustice, contre l’intolérable. Un peuple s’est levé afin de tout faire pour que cette réforme
de retraite ne soit pas appliquée. En effet si elle l’était, elle rajouterait de la discrimination,
augmenterait encore l’injustice contre les plus précarisé.es d’entre nous, les femmes souvent,
les migrants bien sûr. Déjà 30 % des plus pauvres n’atteignent jamais cette retraite. Et dans
quel état de santé seront tous ceux et toutes celles, souvent les premiers, premières de corvée
arrivant à la retraite à 64 ans ?Un peuple c’est pas une foule d’anonymes qui se croiseraient, ce sont des personnes qui se
connaissent et se reconnaissent dans un objectif et un mouvement communs : agir ensemble,
dans l’unité pour plus de justice, plus d’égalité. Pour aujourd’hui, résister et pour demain,
rendre possible un autre monde, une autre société.
Ce n’est pas forcément facile, ça demande du courage. On est partout, des tractages de l’aube
aux AG du soir, ça coute cher à tous ceux et celles qui font grêve. D’autres ne peuvent pas
faire grêve, trop précaires, trop de charges, trop de risques, alors « on a encore plus la rage »,
comme on dit plusieurs.
Mais, ensemble on expérimente en vrai la force du collectif. Le mouvement est uni, mais les
initiatives sont multiples et multiformes, vraiment de l’intelligence collective en or,
« l’imagination au pouvoir » disait on en 68 ! ce sont les occupations de ronds points qui
mélangent des expériences et des cultures militantes diverses, la soirée de la CGT culture à la
Bobine, les rassemblements de jeunes féministes avant ou après les manifs, les départs
collectifs en manif de différents quartiers populaires, les AG sur ces quartiers… Les plus
jeunes créent du neuf, ça se voit sur les pancartes….Au fond il y a toujours quelque part où on
peut rejoindre le mouvement, ne serait-ce que sur un banc au moment de l’arrivée de la
manif…..
Yves : ̈Pour ma part, Ce mouvement contre la réforme des retraites je le vis comme :
Une grande colère et une lutte contre l’injustice au départ, et une grande joie petit à petit au
fur et à mesure des journées de mobilisations et de manifestations
Une joie car beaucoup de rencontres (copains, anciens collègues, famille,..), de discussions,
de la solidarité de ceux qui ne peuvent pas manifester, la transmission avec nos enfants et
même nos petits enfants
On se sent parti prenante d’un collectif, on vit des moments forts dans les manifs, on danse,
on chante
On sent une aspiration à un autre monde que celui qu’on nous propose aujourd’hui
Tout cela on l’a gagné ensemble et personne ne pourra ne nous le reprendre ; C’est ce qui
restera quoiqu’il arrive.
« Heureux les affamés et assoiffés de justice car ils seront rassasiés » dit l’Evangile ;
Aujourd’hui je me sens rassasié partout ce vécu et ces beaux échanges que nous avons eu
ensemble